La pollution de l’air augmente le risque de survenue et la gravité de maladies parfois invalidantes et mortelles
L’exposition à la pollution de l’air augmente les risques de contracter ou d’aggraver un grand nombre de pathologies qui réduisent la qualité de vie. Certaines sont particulièrement invalidantes et sont à l’origine de décès prématurés.
L’ensemble des organes concernés
L'exposition à la pollution de l'air nuit d’abord au fonctionnement de l’appareil respiratoire. En moyenne, un adulte respire environ 12 000 litres d’air chaque jour. Via le mécanisme de la respiration, nous sommes donc exposés aux polluants présents en suspension dans l’air. L’exposition aux gaz et aux particules polluantes aggrave ainsi le risque de survenue et d’aggravation du cancer du poumon, de bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO), d’asthme et de laryngite.
Mais cette exposition à la pollution de l’air impacte plus globalement l’ensemble des organes, systèmes ou fonctions. Les particules les plus fines, en particulier, peuvent passer la barrière pulmonaire et gagner la circulation sanguine irriguant ensuite les différents organes. La pollution de l’air augmente ainsi, par exemple, les risques de contracter ou d’aggraver l’infarctus du myocarde (aussi appelé crise cardiaque), un accident vasculaire cérébral, la maladie de Parkinson, ou un diabète de type 1 ou 2.
Le risque de survenue et de gravité des pathologies liées à la pollution atmosphérique varie en fonction des polluants de l’air : les polluants de l’air identifiés comme étant nocifs pour la santé humaine dans un pays comme la France sont les particules (dont les particules fines et ultrafines), le dioxyde d’azote, l’ozone de basse altitude, le dioxyde de soufre et le monoxyde de carbone.
Le Centre International de Recherche sur le Cancer (CIRC), agence spécialisée de l'OMS, a classé en 2013 la pollution de l'air extérieur et plus spécifiquement les particules comme cancérigènes.
Certaines populations particulièrement sensibles
Les études épidémiologiques montrent que l'âge, l'état de santé - et donc indirectement la précarité - et des prédispositions génétiques influencent la sensibilité à la pollution de l’air. Certains groupes de population, tels que les enfants, les personnes âgées et les individus souffrant de pathologies chroniques respiratoires ou cardiovasculaires sont particulièrement concernés par les effets de la pollution de l’air.
À titre d’exemple, les personnes âgées sont plus sensibles en raison d’une diminution de leurs capacités antioxydantes et de la capacité d'adaptation de leur système de défense. L’exposition à certains polluants entrainant une diminution de l'oxygénation périphérique, une augmentation de la viscosité sanguine et des modifications du rythme cardiaque, les personnes souffrant d’insuffisance coronarienne ou cardiaque sont plus sensibles à la pollution de l’air. Dans les sociétés vieillissantes, la sensibilité face à la pollution de l’air risque donc de croitre.
L’exemple du grand smog de Londres
La prise de conscience des effets de la pollution de l’air sur la santé doit beaucoup à un épisode tragique survenu à Londres entre le 5 et le 9 décembre 1952.
Durant cinq jours, un épais nuage de fumées provenant des usines et des chauffages individuels au charbon a stagné sur le bassin londonien. Les concentrations de particules et de dioxyde de soufre ont atteint des concentrations allant respectivement jusqu'à 1600 et 2800 microgrammes par mètre cube (les concentrations actuelles sont plutôt de l'ordre de quelques microgrammes à quelques dizaines de microgrammes par mètre cube à Paris et à Londres), entrainant un excès de mortalité exceptionnel. Une analyse récente porte à 12 000 le nombre de décès en excès, observés jusqu'en février 1953.
Cette catastrophe sanitaire a entrainé une prise de conscience de l'opinion et des pouvoirs publics. Elle a conduit à la création de législations spécifiques pour lutter contre la pollution atmosphérique : le Clean Air Act (1956) au Royaume-Uni, l’Air Pollution Control Act (1955), puis Clean Air Act (1963, étendue en 1970) aux États-Unis, et la Loi du 2 août 1961 en France.
La pollution de l’air, nocive à court et à long terme
Effets d’une exposition aigüe à la pollution
L’exposition aiguë à des polluants de l’air, à savoir une exposition à certaines concentrations de polluants de l’air de l’ordre de l’heure ou de la journée – a des impacts à court terme sur la santé pouvant survenir dans les jours suivants jusqu’à quelques semaines après l’exposition.
Les études épidémiologiques montrent ainsi que l’exposition aux variations journalières des concentrations de polluants de l’air (notamment les particules, l’ozone de basse altitude, le dioxyde d’azote et le dioxyde de soufre) a un impact à court terme sur la santé, notamment sur les hospitalisations et la mortalité. C'est pour atténuer l'impact d'exposition aiguë à des concentrations élevées de pollution de l'air que peuvent être mises en place des mesures d’urgence dans le cadre du passage en épisode de pollution de l'air.
Effets des pollutions chroniques
L’exposition chronique à des polluants de l’air, à savoir l’exposition à des polluants de l’air sur de longues périodes (plusieurs années) a des impacts à sur la santé humaine pouvant survenir à moyen ou long terme.
L'exposition aux polluants de l’air n'a pas seulement des effets à court terme notamment sur la partie de la population la plus fragile. Elle a aussi au long cours un impact significatif sur l'espérance de vie de l’ensemble de la population, et les résultats des études épidémiologiques montrent que ces effets sont prépondérants par rapport aux effets à court terme de la pollution.
Si l'intensité des risques pour la santé liée à la pollution de l’air est plus faible que celle d'autres facteurs de risque comme le tabac ou l’alcool, la taille de la population exposée étant importante, le bénéfice associé à une réduction de l'exposition de la population aux polluants est important en termes de santé publique.
Se repérer face aux seuils de dangerosité de la pollution de l’air
Plusieurs seuils existent pour comprendre l’impact de son exposition à la pollution de l’air sur la santé.
Les seuils de pollution de l’air recommandés par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) correspondent aux concentrations de pollution de l’air à partir desquelles un consensus scientifique international existe pour affirmer qu’à partir de ces seuils, l’exposition à un polluant de l’air est nocive pour la santé. Ces seuils concernent soit une exposition chronique, soit une exposition aiguë à la pollution de l’air (voir le détail). Plus ces seuils sont dépassés, plus l’impact de la pollution de l’air sur la santé est important.
Les valeurs limites réglementaires correspondent aux concentrations maximales de polluants de l’air que la réglementation, française et européenne, fixe comme étant à ne pas dépasser afin d’éviter, prévenir ou réduire les effets nocifs sur la santé humaine ou sur l’environnement. Ces valeurs limites concernent la pollution chronique. Ces seuils, qui datent de 2008 et doivent être prochainement abaissés à partir de 2030, sont plus élevés que les seuils recommandés par l’OMS (voir le détail).
Les seuils réglementaires d’information et d’alerte correspondent aux concentrations de pollution de l’air observées sur une journée ou une heure à partir desquelles la réglementation, française et européenne, impose la mise en place de mesures d’urgence pour limiter les impacts à court terme de la pollution de l’air sur la santé. Dans le langage courant, on parle d’épisode de pollution de l’air. Ils correspondent à une exposition aiguë à la pollution de l’air. (voir le détail).
L’impact sur la santé de la pollution de l’air, une science en mouvement
Plusieurs études récentes ouvrent de nouvelles pistes de compréhension sur l’impact de la pollution de l’air sur la santé, domaine dans lequel la recherche scientifique fait régulièrement avancer les connaissances.
Si on sait depuis longtemps que l’impact de la pollution de l’air sur la santé n’est pas strictement proportionnel aux concentrations de polluants dans l’air (relation exposition-réponse linéaire), ces études semblent montrer que cet impact serait plus important par unité d’exposition à des concentrations plus faibles (relation exposition-réponse supralinéaire). Si cela était confirmé, cela impliquerait que les études épidémiologiques actuelles sous-estimeraient l’impact de la pollution de l’air sur la mortalité dans les zones de faible exposition.
D’autres études épidémiologiques tendent à montrer qu'il n’existerait pas de seuil en deçà duquel il n'est plus observé d'effet sanitaire, notamment concernant les particules fines. A cet égard, l’OMS souligne que les seuils recommandés sont des niveaux au-dessus desquels des effets graves sur la santé se produisent avec une grande certitude : cela signifie qu'en dessous de ces niveaux, des effets sur la santé peuvent néanmoins être observés et devraient être investigués pour être mieux compris.
Un impact sanitaire important en Île-de-France
Les études épidémiologiques montrent que les niveaux de polluants actuellement observés en Île-de-France sont toujours nocifs pour la santé.
En Île-de-France
L’étude qui fait référence en Île-de-France, menée par l’Observatoire régional de santé d’Île-de-France sur la base des données d’Airparif, estime que la pollution de l’air est responsable de 7 900 décès prématurés chaque année dans la région, soit une perte d’espérance de vie de près de 10 mois, et 11% de la mortalité totale de l’Île-de-France. Ces impacts seraient évités en faisant décroitre les concentrations de particules fines, de dioxyde d’azote et d’ozone de basse altitude sous les seuils recommandés par l’OMS.
Néanmoins, cet impact sur la santé est en baisse, du fait de la diminution des émissions et des concentrations de polluants de l’air au cours des 20 dernières années. A titre d’exemple, l’impact des particules fines sur la santé en Île-de-France a baissé de 40% entre 2010 et 2019 (voir le détail).
Ces estimations portent sur la prématurité des décès qui est la conséquence la plus grave d’une exposition à la pollution de l’air, mais la pollution entraine également des pathologies non mortelles mais invalidantes.
Pyramide des effets de la pollution de l’air
(source : Direction de la santé publique de Montréal - 2003)
Dans le monde, en Europe et en France
Dans le monde, l’OMS estime que la pollution de l’air – en intérieur et en extérieur - est responsable de 6,7 millions de décès prématurés chaque année, dont 89 % dans des pays à revenu faible ou intermédiaire (voir le détail). Pour l’OMS, la pollution de l’air est un des plus grands risques environnementaux pour la santé et fait partie, avec le changement climatique et l’effondrement de la biodiversité, des trois grandes crises planétaires.
L’Agence européenne pour l'environnement (AEE) estime que la pollution de l'air est le plus grand risque environnemental pour la santé en Europe. Elle estime que la pollution de l’air a été responsable, en 2023, de 253 000 décès prématurés en Europe (voir le détail).
En France, Santé publique France (SPF) estime que la pollution de l’air est responsable de 40 000 décès prématurés chaque année, soit une perte d’espérance de vie de près de 8 mois, et 7% de la mortalité totale de la population française (voir le détail).
Comment sait-on que la pollution de l’air est nocive pour la santé ?
Les études épidémiologiques menées depuis les années 1990 montrent que l’exposition à la pollution de l’air entraine un risque accru de certaines pathologies et une surmortalité, ce qui fait consensus dans la littérature scientifique.
Ces études reposent sur l’analyse statistique des relations observées entre des indicateurs d'exposition aux polluants de l’air (concentrations ambiantes en particules ou en gaz polluants) et la survenue d'évènements sanitaires dans la population (décès, hospitalisations pour une pathologie donnée, crises d'asthmes vues en consultation de médecine, etc.).
Elles se basent pour l’étude des effets à court terme sur la comparaison des variations horaires ou journalières d'indicateurs de qualité de l'air (concentration en polluants dans l'air ambiant) et la survenue à court terme d’événements sanitaires.
Pour l’étude des effets à long terme, les études de cohorte reposent sur la comparaison des variations annuelles ou pluriannuelles d'indicateurs de qualité de l'air (concentrations en polluants dans l'air ambiant mesurées ou modélisées) et la survenue à moyen ou long terme d’événements sanitaires. Ces dernières tiennent compte de nombreux facteurs individuels (âge, sexe, tabagisme, niveau d'éducation, index de masse corporelle, etc.) pour identifier et caractériser spécifiquement l’impact sanitaire de la pollution de l’air. Elles nécessitent un suivi relativement long et la participation d’un nombre important de sujets.
En complément, les études toxicologiques apportent des éclairages et une rationalité biologique aux relations statistiques mises en évidence dans les études épidémiologiques, mettant en lumière des mécanismes d'actions propres aux polluants couramment rencontrés dans l'atmosphère : mécanismes d’irritation, d’inflammation, d’oxydation, réduction de la capacité du sang à transporter l'oxygène, etc.
La concordance et la cohérence de ces études étayent la nature causale des risques sanitaires liés aux polluants de l’air.
Pollution de l’air et COVID-19
Au-delà de l’impact du confinement sur la baisse des émissions des polluants, d’un point de vue sanitaire, des liens entre la COVID-19 et la pollution de l’air ont été mis en évidence durant la pandémie sous différents angles :
- l’impact sanitaire de la pollution de l’air est un facteur aggravant de l’épidémie ;
- le confinement chez soi appelle à une vigilance sur la qualité de l’air à l’intérieur de son logement ;
- la pollution de l’air est un facteur de propagation du virus SARS-Cov-2.
Pour mieux comprendre ces enjeux, lire l’analyse des spécialistes sanitaires de l’Association pour la Prévention de la pollution.
Les impacts des mesures de confinement sur la pollution de l’air en Île-de-France, notamment sur les polluants du trafic et des activités tertiaires et industrielles permises, ont été documentées par Airparif et ses homologues dans les différentes régions françaises ainsi que par l’INERIS au niveau national.
Pour plus d’informations, lire :
- Airparif Dossier #03 #04 - COVID-19 et qualité de l'air et Airparif Dossier #05- Les enjeux de santé
- « Pollution atmosphérique : quels sont les risques ? ». Santé Publique France (2022)
- Torben Sigsgaard et al. Assessing the health burden from air pollution. Science (2024)
- Dean E. Schraufnagel et al. Air Pollution and Noncommunicable Diseases : A Review by the Forum of International Respiratory Societies’ Environmental Committee, Part 1: The Damaging Effects of Air Pollution. Chest Journal (2019)
- Dean E. Schraufnagel et al. Air Pollution and Noncommunicable Diseases : A Review by the Forum of International Respiratory Societies’ Environmental Committee, Part 2: Air Pollution and Organ Systems. Chest Journal (2019)